Copie privée – La Cour de cassation explique le test en trois étapes

Publié le par LOUSSOUARN

Par une décision des plus attendues, la cour de cassation, le 28 février 2006, vient de se prononcer sur la légalité de la mise en place d’un dispositif technique dont la fonctionnalité vise à interdire à l’acquéreur du support DVD d’une œuvre cinématographique de réaliser une copie de celle-ci.

 

L’affaire jugée successivement par le Tribunal de grande instance de paris le 30 avril 2004 et la Cour d’appel de Paris le 22 avril 2005 confrontait les positions antagonistes d’un consommateur et d’une association de défense des intérêts des consommateurs à celles d’un syndicat professionnel et de plusieurs sociétés assurant la production, l’édition et la diffusion d’œuvres cinématographiques.

 

Monsieur P. qui souhaitait effectuer une copie du film Mulholland Drive, pour son usage dans le cercle de sa proche famille, s’était plaint de ne pas avoir pu y parvenir en raison de la présence d’un dispositif technique de protection présent sur le DVD qu’il avait acquis.

 

Le particulier débouté en première instance avait obtenu gain de cause en appel, la cour estimant, après avoir mis en œuvre le test en trois étapes, que la copie privée n’était pas un droit mais une exception légale. La cour avait imposé la suppression des moyens techniques qui empêchaient la copie du DVD.

 

Au visa de la loi française au travers des articles L. 122-5 et L. 211-3 du code de la propriété intellectuelle, interprétée à la lumière de la directive européenne du 22 mai 2001 et de l’article 9.2 de la convention de Berne la Cour met en œuvre le test des trois étapes et décide « que l’exception de copie privée […] ne peut faire obstacle à l’insertion dans les supports […] de mesures techniques de protection destinées à en empêcher la copie, lorsque celle-ci aurait pour effet de porter atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ».

 

L'appréciation de l’atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre, qui permet d’écarter l’exception de copie privée dans le cadre de l’application du test des trois étapes, doit se faire au regard de deux éléments. La haute juridiction récuse donc l’analyse in concreto de l’atteinte pouvant résulter de la copie sur la seule exploitation sous forme de DVD.

 

Elle retient une analyse de l’atteinte qui prend en compte les risques « pour la sauvegarde des droits d’auteurs » lié à la réalisation d’une copie – de l’œuvre – dans « le contexte de l'environnement numérique » et la dimension « économique » de l’atteinte au travers de la nécessité de préserver l’exploitation sous forme de DVD qui contribue grandement à « l’amortissement des coûts de production cinématographique ».

 

Cette référence au cout de production fait écho à la décision de première instance qui précisait que « cette atteinte sera nécessairement grave – au sens des critères retenus par la Convention de Berne – car elle affectera un mode d’exploitation essentiel de ladite œuvre, indispensable à l’amortissement de ses coûts de production » mais en lui ajoutant une référence aux risques liés à « l'environnement numérique ».

 

La lecture erronée de l’atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre faite par les magistrats du second degré conduit donc la cour à prononcer une cassation pour violation de la loi.

 

Publié dans Droits d'Auteurs

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